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Easter Island: Early Witnesses

Eugène Eyraud


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   Il me fallait retourner à Anarova, me livrer à ces gens, des mains desquels j'avais eu tant de peine à échapper, et qui m'avait inspiré si peu de confiance. Mais il n'y avait pas à reculer, et je me remis en marche, malgré la fatigue de deux journées passées à courir sur des chemins faits pour déconcerter des pieds européens. Le terrain de l'île est tout volcanique; les pierres et les pointes de rochers se montrent partout. Au milieu de ces pierres et de l'herbe qui croît de tous côtés, il n'existe que des sentiers creux, à peine tracés et moins larges que la semelle du soulier, ce qui vous oblige à marcher les deux pieds sur la même ligne, sans pouvoir jamais les poser carrément sur le sol.
   Arrivé à Anarova, je me vis de nouveau entouré d'une foule bruyante qui couvrait la plage, comme les jours précédents. Le capitaine avait débarqué mes effets. Quelques Kanacs, munis de lances, semblaient monter la garde pour défendre ma propriété; mais ils avaient eu soin de s'adjuger préalablement ce qui s'était trouvé à leur portée. L'un s'était fièrement coiffé de mon chapeau, un autre avait eu assez d'adresse pour endosser ma redingote; tout ce qui n'était pas sous clef avait disparu. Enfin j'avais quelques malles et les montants de la case que j'avais préparée à Tahiti. Le plus pressé pour moi était de construire ma case; mais ce n'était pas chose facile, car les défenseurs de ma propriété paraissaient disposés à la défendre contre moi-même. Les quatre montants attiraient surtout l'attention. Les uns prétendaient que c'était une barque; d'autres cherchaient leur destination. Je leur dis que, s'ils me laissaient faire, j'allais montrer à tout le monde ce que c'était. On me permets alors d'approcher. Je saisis un marteau et quelques clous, puis je

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