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tête sont très-variés. Avant tout, il faut un couvre-chef quelconque. C'est quelquefois un chapeau orné de boutons, ou bien une calebasse, une moitié de citrouille, un oiseau de mer dont on a plus ou moins proprement ouvert la carcasse. Un jour, j'ai vu un de ces chers Kanacs qui avait eu l'esprit de mettre l'un dans l'autre deux seaux à eau, et s'en était gaillardement coiffé. Un autre, ayant trouvé une paire de bottines laissées par les Péruviens, les avait fendues, jointes ensemble, et s'en était littéralement chaussé la tête. J'ai connu jadis un tailleur qui divisait les hommes en deux classes: les gens qui se couvrent et les gens qui s'habillent. Il est évident que les insulaires de Pâques appartiennent à la seconde classe. Ils tiennent peu à se couvrir, pour se défendre du chaud ou du froid; ils tiennent à s'habiller. Donc, dans leurs grands jours, ils s'habillent, ils se parent, ils se chargent de tout ce qui peut s'accrocher de quelque manière. L'homme qui a pu se procurer une robe, se met une robe; s'il en a deux, il en passe deux.La femme qui a sous la main un pantalon, une veste, une redingote, agence tout cela avec le plus d'élégance possible. A tant de luxe, heureux qui peut ajouter des objets sonores, des morceaux de fer, etc.! Mon Torometi, qui s'y connaissait, avait eu bien soin, dès le premier jour, de s'approprier une petite sonnette que j'avais apportée. Elle lui valut, dans la suite, l'applaudissement universel, et réjouit tous les échos de l'île. Voilà des manières de s'amuser qui ne paraîtront peut-être pas très-amusantes à tout le monde. Je suis de cet avis. Mes Kanacs étaient fort étonnés de ne découvrir en moi aucun signe s'admiration ou d'enthousiasme; |
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