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partant de la tempe, va presque rejoindre le sourcil et finit vers la partie médiane du front, à la racine des cheveux. Elle est accompagnée à l'extérieur d'une série de points bleus; une autre ligne, également bleue, entoure la bouche.
Un autre genre de tatouage représente une hache de pierre emmanchée. Le bout ou extrémité du manche part du lobe de l'oreille; la hache dessinée sur la joue dirige les pointes du tranchant vers l'angle externe de l'oeil.
Le lobe de l'oreille, percé d'un trou, pend jusqu'au niveau du menton et est affreusement déformé. Tout le contour du trou ainsi que le cartilage sont ornés d'une ligne de points bleus. D'autres tatouages circulaires entourent le poignet et la cheville.
Les femme portent les cheveux relevés en arrière en forme de chignon. La reine et ses filles ont les cheveux longs; seule aussi, Koreto n'a de tatouage qu'à la lèvre et aux poignets.
Indépendamment des monuments que nous avons décrits, on rencontre dans l'île de Pâques des objets d'un haut intérêt: nous voulons parler de ces planches en bois, de ces bâtons dont les voyageurs ont déjà fait mention et sur lesquels sont gravés de remarquables hiéroglyphes.
Plusieurs exemplaires de ces gravures, aujourd'hui d'une excessive rareté, sont conservés au musée de Santiago.
C'est la seule île de la Polynésie où l'on ait trouvé de semblables documents, très-probablement dus à la génération qui a élevé les statues monumentales. Ces bois parlants, comme on les appelle dans l'île, sont indéchiffrables pour les habitants actuels.
Les rares "bois parlants" que l'on rencontre encore servent aux naturels à enrouler les cordes qu'ils emploient pour leurs lignes de pêche ou leurs filets: c'est à cet usage que l'on en doit la conservation.
Beaucoup d'insulaires portent de petites statuettes généralement taillées dans le bois d'une espèce de mimosa assez commun dans l'île, et auxquelles ils tiennent beaucoup; ce qui prouve l'intérêt qu'ils y attachent, c'est qu'on ne peut qu'avec peine les échanger contre du tabac.
Ces statuettes sont mâles et femelles. Les Kanakes les conservent enveloppées dans de petits sacs d'étoffe de toile ou de coton; quelques-unes sont ornées de colliers et d'une énorme chevelure tressée avec soin.
On rencontre aussi d'autres statuettes en pierre, reproductions exactes en petit, pour la plupart, des statues des cratères.
Les Kanakes possèdent également des ornements en forme de croissants, sorte de hausse-col qu'ils portent sur la poitrine, et d'un usage pour nous indéteminé.
A peu de distance de Mataveri, nous pûmes étudier un petit pakaopa supportant des statues à peine ébauchées. Là, comme à Opulu, il y en avait d'un travail plus fini; c'est celle dont la Flore emporta la tête en 1872, tête aujourd'hui déposée dans les riches galeries anthropologiques du Muséum de Paris.
Une autre terrasse sans statues se voit aux environs du débarcadère de Hanga-Pico.
Le 6, nous nous disposons à aller visiter le volcan de Ranakau, dont les mesures prises par les officiers du O'Higgins donnent quatre cent huit mètres d'altitude.
M. Escande, de son côté, se dirige vers Tauatapu, localité d'où les naturels tiraient les cylindres ou chapeaux des statues et où il en vit un nombre considérable entièrement taillés.
Le cratère du Ranakau, où nous parvenons péniblement, présente une pente intérieure à pic, couverte de roches éboulées, ce qui en rend l'accès difficile. Sa profondeur peut mesurer huit cents mètres sur une largeur de quinze cents mètres.
Un sentier en spirale conduit au fond, qui est rempli de flaques d'eau où croissent des roseaux.
La partie sud du cratère forme une falaise perpendiculaire à la mer.
Placés sur un espace de soixante-quinze centimètres de large entre le rebord de la falaise et celui du cratère, nous voyons à nos pieds l'aiguille de Mota-Nui.
Sur les flancs du cratère poussent de nombreux dracaena, des fougères, une espèce d'acacia à fleurs
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